mardi 15 mai 2007

Journal du Citoyen 15 mai 07

Supplément indépendant d’informations électorales
Sénat : Léon Kengo triomphe,
Léonard She Okitundu s’incline
La Chambre haute du Par­lement congolais a désormais son bureau définitif ! Il a été installé officiellement le 14 mai dernier. Les sept membres qui le composent, conformément à la Loi électorale, sont connus de l’opinion depuis le 11 mai à l’issue de l’élection organisée par le bureau provisoire que di­rigeait Mbueshe Kongo. A la tête du Sénat, trône désormais Léon Kengo wa Dondo, plusieurs fois Premier ministre sous le régime Mobutu.
Il a fallu plus de treize heures pour connaître les sept membres du bureau définitif de la Chambre haute du Parlement. Démarrée à 11h42 le vendredi 11 mai, la plé­nière électorale a été levée à 1h17 le lendemain après toutes les opé­rations de vote.
En l’absence de deux séna­teurs, dont l’ancien vice-président Jean-Pierre Bemba, en séjour pour des soins médicaux au Portugal, les 106 électeurs de la Chambre haute du Parlement se sont ren­dus librement aux urnes au Palais du peuple. Ils ont eu l’occasion de voter dans la transparence et en toute quiétude.
Le duel Léon - Léonard
La joute qui a suscité le plus de passion est sans doute celle qui a opposé Léon Kengo à Léo­nard She Okitundu. Le premier, à défaut du soutien officiel des sé­nateurs de l’Union pour la Nation (UN), membres de l’opposition, s’est présenté sous l’étiquette «in­dépendant».
Il s’est retrouvé face à l’ancien Directeur de cabinet du président Joseph Kabila qui, officiellement, partait avec les faveurs des pro­nostics, dans la mesure où l’Al­liance de la Majorité présidentielle (AMP), forte de 75 sénateurs, soit le tiers des votants, a pris l’option de soutenir sa candidature.
La surprise a été totale à l’issue du scrutin lorsque Léon Kengo wa Dondo a raflé la majorité abso­lue des voix (55 contre 49), à la grande déception des partisans du camp présidentiel.
Composition du bureau définif
Le président élu du Sénat sera secondé par deux vice-présidents : le premier, Edouard Mokolo wa Mpombo, et le second, Mario Phi­lippe Losembe. Le poste de rap­porteur sera assumé par Modeste Mutinga Mutuishayi, l’ex-président de la Haute Autorité des Médias (HAM) pendant la transition. Il sera secondé dans cette tâche par Jean-Pierre Lola Kisanga. A leurs côtés, siégeront Mabaya Gizi Ami­ne et Ndebo Akanda Ignace, res­pectivement questeur et questeur adjoint.
Contrairement au bureau dé­finitif de l’Assemblée nationale qui est totalement composé de membres de l’AMP, celui du Sé­nat affiche une certaine symbio­se. On y trouve tant les membres de la famille politique du chef de l’Etat que ceux d’autres courants. L’AMP occupe 4 postes sur les 7 que compte le bureau. Les 1er et 2ème vice-présidents, ainsi que le rapporteur et le questeur adjoint proviennent de la famille politique du président Kabila.
Du côté des indépendants, on a noté une montée en force avec 3 postes raflés au sein du bureau. Le poste le plus prestigieux est celui du président de la Chambre haute du Parlement qui a échappé aux partisans du chef de l’Etat. Hormis la présidence, les indé­pendants ont aussi gagné les pos­tes de rapporteur adjoint et celui de questeur.
Les candidats de l’opposition mués en électrons libres
A ce sujet, il convient de signa­ler que l’opposition politique n’a pas officiellement présenté des candidats au bureau définitif du Sénat. Les quelques candidats qui se sont présentés aux élections, bien que connus membres de l’op­position, l’ont fait à titre individuel.
C’est ainsi qu’on a vu, par exemple, Mme Eve Bazaïba, por­te-parole de l’Union pour la Nation, postuler à la 2ème vice-présidence, alors que son parti, le Mouvement de libération du Congo (MLC) de Jean-Pierre Bemba, ne reconnaît pas avoir présenté des candidatu­res à ce niveau.
Il en est de même pour le sé­nateur Jean-Pierre Lola Kisanga dont le parti, le Rassemblement congolais pour la démocratie (RCD) - qui ne compte que 7 re­présentants dans cette Chambre - ne s’est jamais exprimé en termes de présentation des candidatures à un quelconque poste au sein du bureau définitif.
La sportivité au rendez-vous
Bien que la nervosité ait été au rendez-vous à chaque étape d’élection pour les sept postes à pourvoir, on n’a toutefois noté le sens de dépassement dans les rangs de sénateurs. Vainqueurs et challengers n’ont pas hésité à se féliciter ou à se faire des accola­des après le vote.
C’était le cas avec l’ancien di­recteur de cabinet du chef de l’Etat et candidat au poste à la prési­dence du Sénat, Léonard She Oki­tundu, qui ne s’est pas gêné d’aller embrasser Léon Kengo. Il en est de même pour Mme Eve Bazaïba et Mario Philippe Losembe, Aubin Ngongo Luwowo et Modeste Mu­tinga Mutuishayi, Justin Kiluba Longo et Ignace Ndebo Akanda.
Ceux qui ont échoué ont recon­nu sportivement leur échec, et les gagnants n’ont pas cédé au triom­phalisme.
Dominique MUKENZA
Voici la composition du bureau définitif du Sénat
Président : Léon Kengo wa Dondo
1er Vice-président : Edouard
Mokolo wa Mpombo
2ème Vice-président : Mario
Philippe Losembe
Rapporteur : Modeste Mutinga Mutuishayi
Rapporteur adjoint : Jean-Pierre Lola Kisanga
Questeur : Mabaya Gizi Amine
Questeur adjoint : Ignace Ndobo Akanda
La Monuc déplore la recrudescence de la criminalité au Nord-Kivu
La Mission de l’Organisation des Na­tions unies au Congo (Monuc) dé­plore la recrudescence des actes de criminalité au Nord-Kivu. Ces scènes de violence se sont intensifiées tant à Goma qu’à l’intérieur de la province, où les clivages ethniques dégénèrent en conflit, a rapporté le porte-parole de la mission onusienne, Kemal Saiki, lors d’un point de presse tenu le 10 mai dernier à Kinshasa.
Cette situation, indique le porte-parole de la Monuc, est due au man­que de progrès en matière sécuri­taire. Pointant du doigt des éléments des Forces armées de la République démocratiques du Congo (FARDC), particulièrement ceux des Brigades mixées, Kemal Saiki reconnaît que l’insécurité s’est amplifiée suite aux violations des droits de l’homme. Il regrette les tracasseries et harcèle­ments commis par des hommes en armes qui provoquent des frustrations au sein de populations civiles.
100.000 déplacés !
Aux dires du porte-parole de la Monuc, il en résulte une situation hu­manitaire préoccupante, caractérisée par un nombre élevé de déplacés. Leur effectif a été évalué à 100.000 personnes entre le 17 janvier et le 26 avril dernier.
Evoquant la tension créée à Goma à la suite de l’assassinat de deux étu­diants en l’espace d’une semaine, Kemal Saiki a fait état «de tentatives croissantes d’instrumentation et de manipulation des populations à des fins politiques».
Il a mis en garde les populations du Nord-Kivu, en particulier les étu­diants, contre les manipulateurs et les instigateurs de troubles, avant de les inviter à faire preuve de discerne­ment, et de calme, «en utilisant les méthodes pacifiques de règlement de conflits ou de revendications légi­times».
Quid du mandat de la Monuc
au 15 mai ?
Le Conseil de sécurité va se réunir dans une dizaine de jours pour sta­tuer sur l’éventualité d’assigner un nouveau mandat à la Monuc, a fait savoir Kemal Saiki se refusant d’en préjuger la résolution.
Selon le porte–parole de la Monuc, la durée et la nature de ce mandat dé­pendent de deux facteurs principaux, à savoir la décision du Conseil de sé­curité et les desiderata des autorités congolaises. «Il y a toujours eu entre les deux parties des consultations avant d’aboutir à une définition d’un nouveau mandat», a-t-il conclu.
Joseph NKAMBIDIO
Sommaire
 Caisse nationale de péréquation : un secours pour les provinces défa­vorisées........................................P.2
 Florence Mogbekuma : «La bon­ne gouvernance et le respect des droits de l’homme sont une priorité post–électorale».............................P.3
 JED exige la sécurité politique, économique, juridique et judiciaire des journalistes...........................P.4
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N°82 - Semaine du 14 au 20 mai 2007

N°82 - Semaine du 14 au 20 mai 2007
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A chaud
Kinshasa : le gouvernement appelé à résoudre le problème de la voirie
Le Gouvernement congolais a entrepris, dans le ca­dre de son programme d’extrême urgence, des travaux de réfection de quelques artères de Kinshasa en état de dégradation avancée. L’Exécutif national tient ainsi à dé­congestionner progressivement les routes dont l’état de délabrement bloque la circulation à travers la capitale. Ces routes sont cause des difficultés de transports en commun à travers la ville-province.
Dans son programme d’ur­gence, le Gouvernement a ouvert treize chantiers rou­tiers. Il a retenu notamment les avenues des Ecuries, de l’Université, la route de Matadi, Ngiri-Ngiri, Benseke…
L’entrée de la commune de N’Djili, les environs du camp militaire Tshatshi et ceux de la Paroisse Saint Léopold sont aussi concernés par ces tra­vaux qu’effectuent les entre­prises EGM construction.
Le financement fait défaut
Les fonds pour les exécu­ter font défaut. D’après le mi­nistre des Travaux publics et Infrastructures (TPI), Pierre Lumbi Okongo, compte tenu de l’ampleur de la défectuosité du réseau routier et de la voirie urbaine, le gouvernement, en dépit de ses maigres moyens, a débloqué un frais de démar­rage pour le début des travaux. Il a salué l’initiative de certai­nes entreprises, comme l’EGM Constructions, qui n’ont pas tardé à pré-financer la réfec­tion des routes.
Se confiant à la presse, le directeur technique des entre­prises EGM Constructions, Si­méon Musindondo, a expliqué que ces travaux, qui ont débu­té depuis quelques semaines, se font sans financement au préalable.
«Nous avons accepté de les faire d’abord par amour pour notre pays», a-t-il affirmé, rassurant pourtant que ces tra­vaux ne vont pas tirer en lon­gueur.
L’Union européenne, à tra­vers son Programme d’appui à la réhabilitation/deuxième volet (PAR II) et les organismes tels que la Coopération technique belge (CTB) ainsi que l’Agence française de développement (AFD) ont également déboursé des fonds pour cette opération. Leur coût n’a toutefois pas été révélé.
La population déçue
«Quelle vie pour ces rou­tes?», s’interrogent les Kinois qui redoutent «le saupoudra­ge». L’ingénieur Musindondo ne mâche pas les mots pour déplorer la manière dont ces travaux sont exécutés : «Le problème est de trouver des entreprises avec un personnel compétent, capable de faire un travail de qualité à la satisfac­tion de tous».
S’agissant de l’avenue de l’Université, le directeur tech­nique des entreprises EGM a affirmé qu’à la demande de l’administration urbaine, le maître d’ouvrage a procédé au remblai d’un grand trou au niveau de l’hôtel La Fayette, dans la commune de Makala, pour faciliter le passage des véhicules. Selon les ingénieurs trouvés sur le chantier, cette avenue comprend quatre nids-de-poule sur le tronçon com­pris entre les avenues Kipasi et Manzengele.
Contactés par le «Journal du Citoyen», certains habitants des communes de Ngaba et Makala sont montés au cré­neau pour charger l’autorité ur­baine. «Rien n’est fait : le sable qu’ils ont mis sera évacué dès la première pluie et notre cal­vaire va continuer», a déploré un taximan qui dessert l’axe Victoire - Rond-point Ngaba. «Ils devraient normalement commencer par la construction ou encore le curage des cani­veaux avant d’en arriver là», s’est-il écrié.
Massés tout le long des routes en réfection, quelques Kinois abordés estiment que «le vrai problème réside au ni­veau de réseaux maffieux qui se partagent toujours les fonds alloués aux travaux de réhabili­tation des routes». «Après avoir partagé l’argent, commente un adolescent, ces gens préfèrent donner le marché aux entrepri­ses fictives créées justement pour jouer le coup». Sans moyens conséquents, l’entre­prise, maître d’ouvrage, à son tour, ne fait que ce qu’elle peut. Conséquence : les défections rapides des routes.
Blaise NDONGALA
A savoir
Caisse nationale de péréquation : un secours pour les provinces défavorisées
Les sept secteurs prioritaires pour le développement de la capitale
La nouvelle Constitution de la République démocra­tique du Congo promulguée depuis le 18 février 2006 par le président Joseph Kabila institue, à son article 181, la création d’une Caisse natio­nale de péréquation dotée de la personnalité juridique. De quoi s’agit-il ? Deux spé­cialistes éclairent l’opinion.
Placée sous la tutelle du Gouvernement central, la Caisse nationale de péréqua­tion a pour mission de finan­cer des projets et programmes d’investissement public. Cet objectif vise à consolider la solidarité nationale et corriger le déséquilibre de développe­ment entre les 26 provinces de la RDC, selon la nouvelle configuration territoriale qui entrera en vigueur dans trois ans (article 226 de la Consti­tution).
L’article 181 de la Loi fon­damentale stipule que le bud­get de cette Caisse nationale sera alimenté par le Trésor public, à concurrence de dix pour cent (10%) de la totalité des recettes à caractère na­tional revenant à l’Etat chaque année.
Le contenu du projet
demeure secret
Mais, pour devenir opé­rationnelle, cette nouvelle structure doit encore attendre l’adoption (par l’Assemblée nationale et le Sénat) de la loi organique fixant son organi­sation et son fonctionnement. Ensuite, l’organe légiférant de­vra requérir l’avis de la Cour suprême de justice sur cette loi avant de passer à l’applica­tion de celle-ci.
Pour l’instant, la loi organi­que devant définir le fonction­nement de la Caisse nationale de péréquation se trouve enco­re au stade de projet. Un haut cadre de l’Assemblée natio­nale, contacté par le «Journal du Citoyen», a révélé que ce projet est en pleine étude à la commission chargée de l’éco­nomie et des finances (Ecofin) de l’Assemblée nationale qui a aligné cette matière parmi les points prioritaires à traiter.
Le contenu de ce projet de loi est pour l’instant tenu secret, car il ne sera porté à la connaissance du public qu’après débat et son adoption par l’Assemblée nationale et le Sénat. Toutefois, un membre de la commission Ecofin de la Chambre basse du Parlement ayant requis l’anonymat a laissé entendre que la Caisse nationale de péréquation n’est pas une nouveauté en soi pour la RDC. Selon lui, cette dispo­sition figurait déjà dans la loi fi­nancière de 1983 (loi 083-003) sous le régime du maréchal Mobutu.
Cette loi instituait, à son article 18, une caisse chargée de faciliter le développement équilibré des provinces. Mal­heureusement, cela n’a jamais été mis en application sous Mobutu.
Voler au secours
des «provinces pauvres»
La RDC ayant opté pour un Etat unitaire, mais fortement décentralisé et donc très pro­che du fédéralisme, la Caisse nationale de péréquation de­vrait permettre à l’Etat congo­lais de voler financièrement au secours de nouvelles provin­ces pauvres en ressources.
En cas de conflits entre le pouvoir central et les provin­ces, la nouvelle Loi fondamen­tale stipule que leur règlement se fera devant la Cour consti­tutionnelle. Mais, en attendant la création de cette institution, cette tâche revient à la Cour suprême de justice.
Dieudonné MBUYI
Ouverts le 8 mai dernier, les travaux des Etats généraux de la ville de Kinshasa se sont clôturés le 10 mai au centre catholique Nganda. Placées sous le thème «le dé­veloppement de Kinshasa par tous et pour tous», ces assi­ses ont mobilisés plus de 200 personnes parmi lesquelles les notables, les bourgmestres, les chefs des quartiers, les avocats, les étudiants, les économistes, etc.
Au cours de ces assises, le gouverneur André Kimbuta Yango a demandé à ses administrés de changer de com­portement et de soutenir son plan d’action pour que la capi­tale reflète son image d’antan, celle de «Kinshasa la belle». Durant trois jours, les participants, venus de 24 communes, ont réfléchi sur les stratégies de développement de la ville. Ils ont élaboré un cahier de charge qui fixe les lignes maî­tresses du programme d’actions du gouverneur Kimbuta. Ce programme sera présenté prochainement à l’Exécutif provincial qui, à son tour, le soumettra à l’approbation de l’Assemblée provinciale.
Les sept secteurs prioritaires
Dans ce document, les participants ont exprimé leurs préoccupations en sept domaines d’interventions : environ­nement ; santé ; énergie ; éducation, jeunesse et culture ; loi, sécurité et protection civile ; infrastructures et trans­ports ; économie et développement.
Pour chaque volet, des pistes de solutions ont été propo­sées. Faisant l’état des lieux du secteur de la santé qui se caractérise notamment par le délabrement des structures hospitalières, la recrudescence des maladies, l’absence du personnel médical qualifié, les participants ont préconisé la réhabilitation et la construction des infrastructures sani­taires, la création des mutuelles de santé, la relance de la campagne de salubrité dans la ville...
Pour remédier aux problèmes liés à l’énergie, il a été recommandé à l’autorité urbaine de créer une brigade de lutte contre le raccordement illicite, et d’instaurer l’usage des énergies renouvelables.
Par ailleurs, dans le volet éducation, les pistes de solu­tions prennent en compte la construction des bibliothèques, la réhabilitation des infrastructures scolaires, l’octroi des bourses, etc. Réserver le petit commerce aux nationaux, encourager les micros crédits, assainir le climat social et du monde des affaires sont autant de recommandations pour redresser le secteur de l’économie.
Blandine LUSIMANA

N°82 - Semaine du 14 au 20 mai 2007
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A coeur ouvert
Florence Mogbekuma : «La bonne gouvernance et le respect des droits de l’homme sont une priorité post–électorale»
Assistante aux programmes et chargée des projets au Comité des Droits de l’Homme et Développement (COD­HOD), Florence Mogbekuma Ngando est engagée dans la sensibilisation électorale depuis plusieurs années. Obser­vatrice des élections présidentielle, législatives, sénato­riales et des gouverneurs et vice-gouverneurs, elle appuie aujourd’hui son ONG dans la sensibilisation de proximité sur la bonne gouvernance et la participation citoyenne.
Mme Mogbekuma, quel type d’activités votre ONG mène-t-elle en RDC ?
Le Codhod, à travers son Programme d’éducation aux droits de l’homme, à la démocratie et à la bonne gouvernance a lancé en no­vembre 2005 une campagne dénommé : «Finie l’illégiti­mité, je dois voter». Cette campagne avait pour objectif de sensibiliser la population à l’«abc électoral» et sur la nécessité de mettre fin à la crise de légitimité dans la­quelle la RDC était plongée au lendemain de 1960. A l’issue de cette campagne, plus de 215 observateurs ont été déployés par le Codhod à travers sa mission d’obser­vation de proximité. Après les élections, notre ONG a lancé, avec le concours du Centre culturel américain de Kins­hasa, la campagne d’éduca­tion à la bonne gouvernance et participation citoyenne. Cette campagne avait pour objectif d’inciter les citoyens à surveiller les élus et à par­ticiper également aux actions publiques. Car il ne suffit pas de voter et de croiser les bras pour attendre la manne, mais de travailler pour le bien-être de tous les électeurs et de contrôler les élus pour qu’ils rendent compte de leur ges­tion. Nous avons organisé plu­sieurs séminaires et ateliers sur la bonne gouvernance municipale et la participation citoyenne depuis décembre 2006. Nous avons également organisé, dans la commune de Barumbu, neuf réunions des quartiers dont l’objectif était de mettre autour d’une table le bourgmestre, les chefs des quartiers, les notables, les as­sociations de base et d’autres habitants, afin d’échanger sur des problèmes spécifiques de leur contrée. Un documentai­re sur la participation citoyen­ne et le respect des droits de l’homme, ainsi que sur une administration au service des citoyens et de la démocratie a été diffusé avant les échan­ges. Quatre communes ont été concernées par ces activi­tés: Barumbu, Kalamu, Kins­hasa et Lingwala.
Comment ces actions sont-elles accueillies ?
Les réactions sont positi­ves dans la mesure où, après les activités menées à Barum­bu, les fonctionnaires nous ont dit que c’est la première fois qu’une commune soit in­citée à se doter d’un plan stra­tégique de développement comme indicateur des actions de développement et base du budget de la commune. Les populations des quartiers ont salué l’initiative de mettre en­semble les mandataires pu­blics et les gouvernés pour des échanges citoyens. Cet accueil s’explique, en outre, par l’acquisition des connais­sances sur la méthode de la participation citoyenne et aus­si par la pratique de la liberté d’expression. Le souhait est de voir ces activités très sou­vent répétées dans les quar­tiers.
Dans quels domaines la participation citoyenne est-elle une priorité post-élec­torale ?
La bonne gouvernance et les droits de l’homme sont une priorité post–électorale, car la bonne répartition des richesses nationales par les élus et la protection des personnes et de leurs biens peuvent encourager la liberté d’entreprendre, la contribu­tion des citoyens en termes de paiement des taxes et im­pôts… pour la reconstruction du pays.
Comment comptez-vous sensibiliser la population aux élections locales ?
Le Codhod, à travers sa Mission d’Observation des élections de Proximité (MOP), accorde une importance par­ticulière aux élections locales. Notre partenaire, le Centre culturel américain de Kinsha­sa, par le biais de son direc­teur Christopher Davis, estime que toute politique est locale, comme l’a soutenu un des présidents des Etats-Unis. La campagne sur l’éducation à la bonne gouvernance et la par­ticipation citoyenne que mène actuellement le Codhod dé­veloppe plusieurs activités afin de préparer les citoyens des quartiers à porter une attention particulière à ces élections. Car, «si toute poli­tique est locale, tout dévelop­pement est également local». L’approche utilisée est nova­trice à travers une projection de documentaire de «cons­cientisation by night ».
Propos recueillis par
Bibiche MUNGUNGU
et Désiré BAERE
Mme Florence Mogbekuma exhorte les Congolais à accorder une importance capitale aux élections locales. (Photo JDC)
Micro baladeur
Que pensez-vous de la suspension des dirigeants de la Regideso et de la Snel ?
Sarah Kabongo, étudiante, Kasa-Vubu
C’est une excellente déci­sion, parce que les dirigeants de la Régie de distribution d’eau (Regideso) et de la So­ciété nationale d’électricité (Snel) ont brillé par leur in­compétence. On manque de l’eau potable et de l’électricité. Situation anormale aussi long­temps qu’on est dans un con­trat qui nous oblige de payer des factures et, en retour, ces sociétés doivent nous fournir leurs services. Malheureuse­ment, nous n’en bénéficions pas. Notre souhait est d’avoir constamment l’eau et l’élec­tricité. Nous ne sommes pas obligés d’interrompre le som­meil pour puiser de l’eau ou dormir à la lumière de la bou­gie à cause du délestage.
Théophile Muzenzi,
aide-maçon, Masina
Je suis d’avis que les co­mités suspendus n’ont pas bien géré. Sous leur mandat, les cas de délestage se sont multipliés à travers la capitale et la pénurie d’eau a incité la population à parcourir 2 à 3 ki­lomètres à pied en pleine ville comme si on était au village. Dans certaines communes, l’eau coule du robinet entre 23h00 et 4h00 du matin. Ce qui oblige les consommateurs à veiller pour en avoir. Or, il y a quelques années, on ne connaissait pas le phénomè­ne «délestage», ni la rupture régulière de l’approvisionne­ment en eau potable. Je me demande d’où vient cette pénurie. Pourquoi dans les pays qui sont servis à partir de notre barrage, on ne parle pas de délestage ? Pour moi, il s’agit tout simplement de la mauvaise gérance. Que les successeurs des dirigeants suspendus sachent que la gestion d’une entreprise n’est pas une affaire de frères, amis ou connaissances.
Denis Wathum,
fonctionnaire, Ngaliema
A mon avis, le gouverne­ment a réagi à la question ora­le d’actualité posée au niveau de l’Assemblée nationale, celle de savoir le pourquoi du déficit de desserte en eau et en électricité par la Regideso et la Snel. La mauvaise ges­tion dans ces entreprises se situe premièrement au niveau des avantages dont jouissent les cadres qui ont des salai­res très élevés, pendant qu’on ne voit pas d’investissements pour rendre les entreprises viables. Il y a donc inadéqua­tion entre les avantages que les cadres se tapent et le ser­vice rendu à la société. Raison pour laquelle rien ne marche.
Mimie Etaka, ménagère, Matete
L’absence de l’électricité entraîne beaucoup de cas d’insécurité. Tout comme les coupures intempestives en­dommagent plusieurs appa­reils électroménagers. En outre, le délestage, devenu monnaie courante, nous exige des dépenses supplémentai­res. Je soutiens les sanctions contre les dirigeants de la Re­gideso et de la Snel, en espé­rant que cela servira de leçon aux autres gestionnaires des entreprises publiques, car la mégestion n’est pas seule­ment observée dans ces deux sociétés. Elle concerne toutes les entreprises étatiques. C’est aussi une façon de démontrer qu’après les élections, on tend réellement vers un Etat de droit souhaité par tous.
Antony Lutumba, supervi­seur des balayeurs de rue, Barumbu
Je me réjouis beaucoup de la décision gouvernemen­tale du fait que, sous le régi­me de Mobutu, on n’a jamais connu le délestage qui devient aujourd’hui courant à la Snel. Et paradoxalement, on peut passer une semaine sans cou­rant, mais à la fin du mois, on se retrouve avec une facture qui ne tient pas compte de cet aspect ! Il en est de même en ce qui concerne l’eau. Il n’est pas normal de voir que, dans un pays gâté par la nature, on manque de l’eau potable dans la capitale. En plus, lorsque la société veut servir les abon­nés, elle choisit souvent les quartiers des nantis. Que la sanction infligée à ces comités de gestion serve de leçon aux successeurs !
Propos recueillis à Kinshasa par Dominique MUKENZA
N°82 - Semaine du 14 au 20 mai 2007
Echos des provinces
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PROVINCE ORIENTALE
Brèves
JED exige la sécurité politique, économique, juridique et judiciaire des journalistes
Une sélection de
Blaise NDONGALA
Invalidation. La Cour suprême de justice a rendu, le 7 mai dernier, un arrêt portant publication de la liste définitive de 500 députés nationaux. Après examen de plus de 300 recours en contestation des résultats de la Commission électorale indépendante (CEI), 18 députés, dont l’ancien président du bureau provisoire, Mbenza Thubi, ont vu leur mandat invalidé.
Présidentielle. Le président du Mouvement de Libération du Congo (MLC), Jean-Pierre Bemba, s’est réjoui de l’élection de Nicolas Sarkozy à la présidentielle française. A partir du Portugal où il suit les soins médicaux, il a félicité le nouveau locataire de l’Elysée. Joint au téléphone, Bemba a salué les déclarations de Sarkozy en faveur des Africains.
Sénat. Parti leader de l’Opposition institutionnelle, le MLC ne s’est pas lancé dans la course au perchoir de la Chambre haute du Parlement. Romain Nimy, son secrétaire national en charge des réformes, a indiqué que la situation politique actuelle ne permet pas à l’opposition institutionnelle de briguer la présidence du Sénat.
Nord-Kivu. L’opération de mixage lancée dans l’Est du pays pose problème. Les éléments fidèles au général dissident Laurent Nkunda n’obéissent qu’à leur chef. Les députés sont en colère. Ils pensent qu’au lieu de mixage, les hommes de Nkunda devraient passer par le brassage.
La Journée internationale de la presse a été célébrée le 3 mai dernier à Kisangani sous le thème «Liberté de presse, sécurité des journalistes et impunité». L’ONG de défense de liberté de la presse «Journalistes en danger» (JED) a organisé, à cette occasion, une journée de réflexion en faveur de professionnels des médias de la Province Orientale, du Sud-Kivu et du Nord-Kivu en formation dans cette ville, sur la surveillance des cas d’atteinte à la liberté de la presse dans leurs provinces.
Le président de JED, Donat Mbaya, a fait savoir à ce sujet que, pour bien faire son travail, le journaliste a besoin de la sécurité politique, éco­nomique, juridique et judiciaire.
«La sécurité politique implique la volonté des gouvernants à accepter des critiques et dénonciations», a-t-il expliqué. A propos de la sécurité économique, il a indiqué qu’«on ne peut pas parler de liberté de la pres­se avec des journalistes pauvres, corrompus, sans contrat de travail et salaire décent».
La sécurité juridique suppose l’existence des normes protectrices des droits et libertés des journalis­tes, telle que la dépénalisation des délits de presse. La sécurité judiciai­re, quant à elle, implique la garantie de l’administration d’une justice indé­pendante et non partisane, a déclaré Donat Mbaya. «Les journalistes sont victimes d’une justice au service des hommes forts, riches et corrompus», a-t-il soutenu.
Ouvrir les médias à tous
les courants politiques
Le coordonnateur provincial de la Haute Autorité des médias (HAM), Benoît Kuda, a indiqué à la même occasion qu’en cette période de démocratie naissante au Congo, pluralisme politique suppose aussi pluralisme des médias et d’opinions. Il estime que les médias publics ne donnent pas assez de temps d’an­tenne et de parole aux opposants politiques, et que l’information reste plus la version officielle que les faits.
«Il faut, a-t-il dit, ouvrir les médias publics à tous les courants politiques, de pensée et d’opinion pour concré­tiser la liberté d’expression». L’évo­cation des raisons d’ordre public ne sert, d’après le coordonnateur de la HAM, que de «prétexte aux diri­geants pour museler la presse».
«Pas d’Etat de droit sans liberté de presse»
Le président provincial de l’Union nationale de la presse du Congo (UNPC), Flory Ngongo, a insisté sur le fait que l’émancipation politique d’un Etat est aussi liée au dévelop­pement des médias.
«Il n’y a pas d’Etat de droit sans une large liberté de presse», a-t-il déclaré, faisant remarquer qu’en tant qu’outil de bonne gouvernance, la presse doit surveiller la gestion des institutions publiques et privées.
Mais il a préconisé «une remise en question perpétuelle» de la for­mation des journalistes, pour que ceux-ci puissent accomplir leurs tâ­ches avec beaucoup plus de respon­sabilité.
GBL
InterCongo media/Syfia
Supplément indépendant
d’informations électorales
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Kinshasa/Gombe
e-mail : journalducitoyen@yahoo.fr
081- 0123090
http://www.jdconline.net
Projet de la Haute Autorité des Médias, financé par DFID, la DGCD, l’APEFE et l’ACDI;
en partenariat avec l’Institut
PANOS Paris et l’APEFE
Le «JDC» est envoyé en province avec l’appui logistique de la MONUC
Consultant
Philippe DE BOECK
Directeur de rédaction
Yves KALIKAT
Rédacteur en chef
Désiré BAERE
Gestion et Comptabilité
Sylvie KOKOKANI
Pigistes (Kinshasa)
Joseph NKAMBIDIO (APA)
Olivier DIOSO (Le Potentiel)
Dominique MUKENZA (Le Phare)
Blandine LUSIMANA (L’Observateur)
Bibiche MUNGUNGU (La Référence Plus)
Blaise NDONGALA (The Post)
Dieudonné MBUYI (La Tempête des Tropiques)
BANDUNDU
Gouvernement provincial : d’immenses défis pour la nouvelle équipe
Le gouverneur du Bandundu, Ri­chard Ndambu, a publié le 23 avril dernier, le tout premier gouver­nement de cette province. La forma­tion de l’équipe gouvernementale intervient trois mois après l’élection du gouverneur et du vice-gouver­neur.
Ce gouvernement comprend dix ministres, dont une femme qui s’oc­cupera de finances, de l’économie, du commerce, de l’industrie et de la condition féminine.
A part quelques têtes bien con­nues, la plupart des ministres sont très peu connus du public. Comme défis à relever, le gouvernement provincial de Bandundu doit ré­soudre plusieurs problèmes : rou­tes impraticables, enseignement au rabais, santé, pénurie d’eau et d’électricité, environnement insalu­bre… Mais, il lui faut au départ trou­ver des locaux pour abriter tous les ministères.
Préoccupations de la population
La population a accueilli avec prudence la nomination de cette équipe gouvernementale. «C’est bien d’être désigné ministre, mais c’est mieux de faire preuve de ses compétences», déclare Max Maye­le, directeur des études à l’Institut Nto-Misengi à Kikwit. Celui-ci pen­se que cette équipe gouvernemen­tale est très réduite. «Les défis sont nombreux et grandioses», dit-il.
Vendeur en ville basse, Marc Buka invite le nouveau gouverne­ment à vite trouver une solution à la situation qui prévaut dans le ter­ritoire de Kahemba. «Que ce gou­vernement s’efforce de résoudre l’épineux problème du groupement Shayimbwanda sous occupation angolaise», insiste-t-il.
Mbuta Mwashi, un jeune de la paroisse Saint-Esprit à Kikwit III, s’apitoie sur le sort des fonctionnai­res. «A bas le salaire de misère…», rengaine-t-il.
«J’attends que Richard Ndambu et son équipe gouvernementale va­lorisent réellement la femme. Ne voyez-vous pas que, dans cette équipe, il n’y a qu’une seule fem­me? N’y a-t-il pas de compétences parmi les femmes pour devenir mi­nistres?», lâche Aline Tundunge, une ménagère résidant dans la commune de Lukolela.
Badylon KAWANDA
InterCongo media/Syfia
Pigistes (provinces)
Correspondants de Syfia/InterCongo média
et de Panos Paris
Dessin
Patou BOMENGA
Lay-out et mise en page
ASIMBA BATHY
Diffusion
Jean KIALA
Fabrice RUGAMIKA

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